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DEMAIN, C'EST LOIN

Martine Canneel, Demain sera meilleur, 1972


Vues de l'exposition "Les Amazones du Pop », MAMAC, Nice, 2020

L’œuvre de Martine Canneel est une invitation à s’évader. Une machine en acier froide qui s’illumine. Conçue pour s’allumer à l’insertion d’un « jeton », elle s’anime, luit de mille feux et nous sommes émerveillés. La lumière, les couleurs sont attrayantes et nous voilà comme des enfants face à une machine à confiseries, une machine à sous, une machine à pochettes surprises.

Les références au monde de l’enfance sont multiples – petites voitures, néons colorés, motif de l’arc-en-ciel – et nous invitent à pénétrer un monde merveilleux emplis de couleurs et de joie dans lequel nous serions tous légers et enveloppés de barbe à papa. La phrase « Demain sera meilleur », s’illuminant à la manière de la devise d’un parc d’attraction ou de la phrase finale d’un conte de fée, promet un avenir idéal et prospère. Et on aurait presque envie d’y croire.

Seulement, voilà. Les petites lettres inscrites en bas à droite de la machine nous le rappellent : « Pour ESPERER, mettez un jeton dans la fente et pressez le bouton ». Comme les petites lettres en bas d’un contrat qu’il faudrait déchiffrer, ces quelques mots résonnent et rendent impossible tout rêve gratuit. La signalétique l’indique, il faut faire « attention » : produit dangereux.

Pour que la lumière s’allume, il faut obéir aux mots. Il faut payer.

« Demain sera meilleur ». L’effet miroir produit par le reflet de ces mots dans le fond de la machine crée l’impression d’un mirage qui se reproduit et s’évapore à l’infini. Cette machine si réjouissante et ludique au premier abord s’adresse à nous et nous ramène à notre triste condition de consommateur, incité et persuadé à travailler, à consommer, à y trouver du bonheur et à en prendre plein les yeux pour oublier la réalité.

Demain sera-t-il vraiment meilleur ?

Parmi les éléments qui constituent l’œuvre, tous similaires, les petites voitures identiques bien rangées et les carreaux bleu foncé bien organisés, certains éléments font dissonance. Ils sortent du lot. Certains carreaux du bas du cadre, sont rose, orange, bleu clair. A la fois visibles et invisibles, ils se fondent dans la masse et sortent du rang. La ligne de carreaux supérieure, comme un horizon lointain, est, elle, déjà remplie de couleurs. Resterait-il un peu d’espoir et de gaieté dans cet univers froid, terne et rangé ? des éléments de réponse déjà parmi nous ?

Demain c’est loin. Cette œuvre date de 1972 et résonne ô combien encore aujourd’hui, et pour combien de temps encore. Comme si un sous suffisait à faire repartir la machine.

Martine Canneel, Demain sera meilleur, 1972

Sculpture lumineuse, assemblage

217 x 153 x 15cm

Collection privée

Visible dans l’exposition « Les Amazones du Pop » au MAMAC, Musée d’art moderne et d’art contemporain de Nice jusqu’au 29 août 2021

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